Itinéraire de Herman Künig von Vach

 

   

            illustration de l'édition de 1495

            itinéraire de Künig von Vach : traduction intégrale personnelle

            itinéraire de Künig von Vach : traduction intégrale (Fondation David Parou) PDF   http://www.saint-jacques-compostelle.info/

            itinéraire de Künig von Vach : texte de 1495 PDF

 

  Dans les dernières années du XV° siècle, un moine des environs de Strasbourg,, Herman Künig von Vach, rédigea un guide rimé à l'usage des pèlerins allemands.

  La première édition de ce guide, intitulé "Die walfahrt vnd Strass zu sant Jacob", fut imprimée par Mathias Hupfuff à Strasbourg en 1495, probablement immédiatement après sa rédaction. Quatre autres éditions (la dernière sortie, en 1521, des presses de Jobst Gutknecht à Nuremberg) démontrent la vogue dont jouissait le pèlerinage compostellan parmi les milieux populaires, auxquels était destiné ce petit livre.

  Konrad Haebler en a publié une reproduction fac-simile sous le titre de: "Das Wallfahrtsbuch des Hermannus Kunig von Vach und die Pilgerreisen der Deutschen nach Santiago de Compostela". Strassburg, 1899.

  Il a existé apparemment une traduction en bas-allemand du même guide; elle semble pouvoir être identifiée avec "D'overen là meddelen straten van Brunswygk tho Sunte Jakob in Gallicien", 1518. ("livre très connu et très consulté par les pèlerins flamands").

 

  Le peu de ce que nous savons de son auteur, nous le devons à l'incipit de toutes les éditions :

 

                         Ich Hermannus künig von Vach

                         Mit gottes hulff wil mach

                         Eyn kleynes buchelyn

                         Das sal sant Jacobs strass genant syn.

 

  "Moi, Hermann Künig von Vach, je veux, avec l'aide de Dieu, faire un petit livre qui s'appelle "le chemin de Saint Jacques".

 

                  

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  Son itinéraire commence en Suisse, au sanctuaire de Notre Dame de Einsiedeln, centre de pèlerinage au sud du lac de Zurich. Dans le voyage d'aller, il décrit ce qu'il appelle la "Obere Strasse ", peut-être parce qu'elle part de la haute Allemagne et traverse les Alpes au début de son parcours; en l'opposant à la "Niederstrasse", qu'il décrit dans le voyage de retour, et qui après avoir traversé l'ouest de la France et les Pays-Bas, rentre en Allemagne par Aix-la-Chapelle.

 

  Depuis Einsiedeln (Eynsideln), qui paraît avoir été choisi avec prédilection comme point de départ par les pèlerins allemands, le chemin que décrit Künig allait à Lucerne (Lucern), et de là, par Berne (Bern), Fribourg (Fryburg), Moudon (Merdon) et Romont (Reymond), jusqu'à Lausanne (Losan). Ensuite, la frontière entre la Suisse et la Savoie était entre Morges (Morsel) et Rolle (Roll). En longeant le lac Léman par Nyon (Nefass), Coppet (Küp), Versoix (Wasse), on arrivait à Genève (Senefass, Genff), où il recommande l'auberge allemande de Peter von Freiburg, à l'entrée de laquelle était accrochée une enseigne avec l'image de Saint Jacques, et qui se trouvait à côté d'une chapelle de l'apôtre. Par Rumilly (Remiliacus), Aix-les-Bains (Ax) (dont il mentionne les eaux médicinales), Chambéry (Schamerey), Les Echelles (Leytern), Voiron/ Moirans (Feroms/Meretin), L'Albenc (Aibon, Arbon) (où il y avait une fabrique de peignes), Vinay (Fynit) et Saint-Marcellin (Sankt Marcellyn), on arrive à Saint Antoine l'Abbaye (Sankt Anthonio), à la frontière avec la France. A Saint-Antoine, il recommande aussi les auberges allemandes, où les pèlerins pouvaient trouver de l'aide pour les opérations de change de monnaie.

 

  Le chemin longe ensuite la vallée de l'Isère par sa rive droite, en passant par Romans (Roman, Romannis), où il y a un hôpital, vers Valence (Fallentz), et de là par la rive gauche du Rhône, en mentionnant le passage par Livron sur Drôme (Liberon, Liberonis), Loriol sur Drôme (Aureoli), Montélimar (Monteloiki, Azemarschnel), Châteauneuf du Rhône (Castel de ratis, Castel noue), Donzère (Dusera), Pierrelatte (Petrasata, Petralata), Lapalud (Pallude), jusqu'à Pont-Saint Esprit (Sanct Spiritus), avec un pont de pierre qu'on peut passer sans payer de péage. Jusqu'à Nîmes, il cite les localités suivantes: Trebis (Tresis) (St Nazaire ?), Bagnols sur Cèze (Balneolis), Le Pin (Bynum), Vallabrix (Valle brutunt) et Uzès (Lucetia), avec un hôpital. D'Uzès à Nîmes, le terrain est accidenté et on doit aller par de mauvais chemins. À Nîmes (Nymass),  les pèlerins pouvaient recevoir aumône au couvent des augustins, et au lieu de poursuivre directement vers Montpellier, l'itinéraire fait une courbe prononcée pour passer à Aigues Mortes (aquas mortis). À Montpellier (Mompelyr), il y a un hôpital de pèlerins, mais son administrateur, signale Künig, est un ennemi est juré des allemands.

 

  L'itinéraire continue par Gigean (Gyzanum), Loupian (Lupianum) et Saint Thibéry (Tyberium) vers Béziers (Bysere), et de là, passé l'Orb, à Capestang (Caput stagnum), où commence un désert qui va jusqu'à Cabezac (Cabasaccum). A Homps (Ulmis) on revient en terrain habité, et passant par Marseillette (Marsilia) et Trèbes (Trebiss) on arrive à Carcassonne (Gargazon), avec un hôpital de pèlerins, et  de là, par Villepinte (Villa pinta), Castelnaudary (Allefrancken, Castelnoue de arrio), avec hôpital de pèlerins, Avignonet-Lauragais (Armeto?), Villefranche de Lauragais (Fasesio ?), Montgiscard (Monteseart, Montescart), Castanet-Tolosan (Castaneto), également avec un hôpital, jusqu'à Toulouse (Doloss, Tolosan)

 

  Depuis Toulouse les hôpitaux de pèlerins sont plus fréquents, et on en trouve parfois plus d'un dans une même localité, sans qu'il en manque généralement à chaque étape. Jusqu'à Auch, l'itinéraire décrit coïncide avec la route actuelle, passant par L'Isle Jourdain (Insula Jordanis), Gimont (Gemonte) et Aubiet (Obiel). Depuis Auch (Aust), il ne coïncide avec aucune des principales voies de communication actuelles; en direction est-ouest, il passe par Barran (Barran), L'Isle de Noé (Insula), Montesquiou (Montes gibo), Marciac (Marsiack) et Maubourguet (Mamergeto), où commence la terre d'Armagnac (Armer-Jacken-Land), qui amène à Roncevaux par Morlaas (Morlaiss), Arthez (Artess), Orthez (Ortesium), Sauveterre (Salua terra), avec douane à l'entrée de la Navarre, Saint-Palais (San Blasio) et Saint Jean Pied de Port (San Johans stat). Un village (Larceveau ?) où on fabrique des clous pour les chaussures donne l'occasion de les préparer pour la montée des Pyrénées, et arriver au monastère de Roncevaux (Rontzefall).

 

  Le guide de Künig mentionne en Espagne beaucoup moins de localités que dans le midi de la France. Le chemin coïncide avec peu de variantes avec celui du Guide du Liber Sancti Jacobi, et aussi avec celui suivi par Caumont, et celui que Laffi suivra au XVII° siècle. Il mentionne soigneusement les points où le pèlerin trouve de l'eau et les hôpitaux. De Roncevaux/Roncesvalles (Rontzefall) à Pampelune/Pamplona (Pepelonia), il y a six milles en descente, et un seul hôpital offre asile au pèlerin. À Pampelune, par contre, où on trouve la cour du roi de Navarre, la cathédrale nourrit douze pèlerins; à Santa Maria et à Santa Maria Magdalena il y a deux hôpitaux, et avant et après la ville, à peu de distance, il y en a deux autres; et un troisième à mi-chemin de Puente la Reina.

 

  La route depuis Puente la Reina (Ponteregina), où il y a deux hôpitaux, passe par Los Arcos (Arcus), que Künig appelle "la ville des juifs" (die Juden staat), et Viana (Vianna), pour arriver à Logroño (Grüningen, Lagrona). C'est la première ville du royaume de Castille, et il faut y changer la monnaie. Suivent Navarrete (Nazareto), Najera (Nazera), Santo Domingo de la Calzada (Dominicus), où il mentionne la poule, Grañon (Graneon), Redecilla del Camino (Redihile), Belorado (Dolorosa) et Villafranca Montes de Oca (Vylfrancken). Dans presque toutes, jusqu'à Burgos (Burgess), il y a un hôpital. Dans cette ville on en compte jusqu'à trente-deux. Il fait allusion à l'histoire d'un administrateur d'un des hôpitaux qui avait empoisonné des centaines de pèlerins et qui avait été condamné à mort. Après Burgos, il mentionne l'église de Sant Thonges (couvent de San Anton, avant Castrojeriz); Castrojeriz, qui se transforme sous sa plume en ey des heist schlos Fritz, de la même façon qu'il est transposé en Quatre souris dans les itinéraires français; Carrion de los Condes (Garrion, Charrion), Sahagún (Saguna), Mansilla de las Mulas (Mansilo), pour arriver à León, où il indique la déviation pour visiter les reliques de San Saluador d'Oviedo.

 

  Après Astorga (Storgess), sans avoir mentionné auparavant aucune localité entre Leon et cette ville, il signale au pèlerin qu'il doit passer trois ponts et monter une montagne où il y a une grande croix de fer (col de Foncebadon), ce pourquoi il devrait prendre à gauche; mais le conseil de Künig est d'éviter le passage de ces montagnes: "Hütte dich vor der Rabenel ist mein rat", et qu'en prenant à main droite on va à Ponferrada par un autre chemin, que la mention de Santa Marina (Sancte Maurin) caractérise suffisamment comme celui du col de Manzanal.

 

  A Ponferrada (Bonforat), il mentionne le château, et le nouvel aspect des fermes de la région en hameaux dispersés et rapprochés. Trois milles après, on rencontre Cacabelos (Kacafelos), et cinq milles plus loin Villafranca del Bierzo (Willefrancken), où le vin est doux et traître. En arrivant  dans les montagnes du Cebrero, l'Allefaber ou Malefaber, célèbres parmi les pèlerins allemands qui lui donnaient ce nom, corruption de celui du village de La Faba, Künig conseille de ne pas monter par la montagne (Wil tü donnent Allefaber nicht anstygen Sous lass in uff die lyncken hant lyggen), en la laissant à main gauche, et en suivant sans doute un parcours semblable à la route actuelle, arriver à Lugo (Lucas) après onze milles. Dans cette ville il mentionne les eaux thermales près du pont et les murailles.

 

  À quatre milles, en sortant par le pont, il y a la  zübrochene stat, (probablement Mellid, la Villarumpeta de l'itinéraire de Harff), et  à neuf milles de là Santiago, qu'on aperçoit depuis la montagne (de San Marcos), où il y a une croix et un grand tas de pierres. Il ne décrit pas la ville de Santiago (Sankt Jakob, Compostell) ni son église. Il ne fait pas allusion non plus aux visites qui étaient alors le complément presque obligé du pèlerinage à Compostelle, à Padrón et à Finisterre.

 

  Le retour se fait par la "Niederstrasse", l'itinéraire coïncidant avec le précédent jusqu'à Burgos (Burgess). À la sortie de cette ville, à la croix de pierre, il faut prendre à gauche et demander le chemin du " Porten berge ", que l'itinéraire détaillé de Harff nous permet d'identifier avec le port de San Adrian. Künig se limite à dire qu'il faut parcourir vingt-six milles sans beaucoup de villages. Il fait allusion aussi, avec beaucoup d'imprécision, à un autre chemin par le port de Saint Nicolas (San Niclass) (?), et  à la possibilité d'aller jusqu'à Pampelune (Pompelonia) et  là, par l'hôpital de monte sancta maria (Santa Maria de Velate), à Bayonne (Byon).

 

  Pour traverser les Landes, entre Bayonne et Bordeaux, Künig indique deux chemins: le plus fréquenté, qui allait par Dax (Ax) et "die kleine Haide", il ne le recommande pas, parce qu'on n'y trouve pas de logements pour les pèlerins, et ses habitants sont peu enclins à leur donner des aumônes; c'est pourquoi il trouve préférable d'aller par "die grosse Haide" (les Grandes Landes), chemin qui traverse un désert de trente-six milles, mais qui est bien pourvu d'auberges en fin de parcours. A Bordeaux (Bardewesch) aussi, il y a de nombreux établissements de bienfaisance, et il recommande de profiter des aumônes pour investir les économies dans un passage en bateau jusqu'à Blaye (Ble), et de prendre ensuite le chemin par Pons (Ponss), Saintes (Sentes) et Lusignan (Allesion), vers Poitiers (Butyrss), Châtellerault (Schattelareye), Ste-Catherine-de-Fierbois (Sankt Katheryn), et Tours (Thorss, Touron).

 

  Depuis là, on peut aller à Metz pour trouver la frontière allemande; mais le guide poursuit par Amboise (Amboss), Blois (Blese), Orléans (Orliens) et Etampes (Stamposs) jusqu'à Paris (Pariss). Là aussi s'offraient différentes routes, en indiquant les distances jusqu'à Amiens et Arras, vingt-huit et quatorze milles respectivement. Künig paraît suivre cette dernière option. Après avoir visité Saint-Denis (Sankt dionysius), il poursuit par Clermont (Cleremon), Amiens (Hamyenss), Arras (Harrass), Douai (Thobaie), Valenciennes (Sankt fallentius), entrant aux Pays-Bas par Mons (Bergen do Henegaw), Soignies/Zinnik (Sone), Braine le Comte (Brenlekont) et Hal (Hall), jusqu'à Bruxelles (Prüsszel), et de là, par Louvain (Lofen), Diest (Ditsch) et Maestricht (Tricht) à Aix-la-Chapelle (Ach), où se termine le guide.

 

                

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delhommeb at wanadoo.fr - 21/08/2017